Inde – Pakistan : la réalité de l’affrontement de Mai 2025
/Une fois encore, dans le narratif de l’affrontement entre l’Inde et le Pakistan qui a duré 4 jours (du 7 au 10 mai 2025), nous avons assisté à un modèle de désinformation… Ainsi le soi-disant quotidien de référence « Le Monde » titrait-il le 23 mai : « Inde-Pakistan : quatre jours de guerre, deux versions des combats, et toujours aucun gagnant ». Quand d’autres n’hésitaient pas à susurrer que l’Inde avait en fait perdu dans son objectif de guerre.
Revenons d’abord sur un peu d’Histoire et sur un rappel des faits récents.
L’Histoire de la région résumée*
Dans la nuit du 14 au 15 août 1947, le vice-roi des Indes Lord Louis Mountbatten acte la fin de deux siècles de domination britannique sur le sous-continent indien.
L'ex-colonie est divisée en deux États: l'Inde, à majorité hindoue, et le Pakistan à majorité musulmane. Cette partition jette sur les routes près de 15 millions de personnes: musulmans vers le territoire pakistanais, hindous et sikhs en direction inverse. Elle cause des émeutes et des massacres qui font un million de victimes.
Dès l'automne 1947 éclate la première guerre indo-pakistanaise pour le contrôle du Cachemire, rattaché à l'Inde. Un cessez-le-feu est proclamé le 1er janvier 1949 le long d'une "ligne de contrôle" de 770 km qui divise le Cachemire en deux parties: 37% reviennent au Pakistan (Azad-Kashmir) et 63% à l'Inde (État du Jammu-et-Cachemire). Malgré cet accord, les deux États revendiquent toujours la souveraineté de tout le territoire.
Entre août et septembre 1965, le conflit est ravivé par l'intrusion au Cachemire indien d'un millier de séparatistes soutenus par le Pakistan : encore des morts !
Fin 1989 des insurgés, qui réclament l'indépendance ou le rattachement du Cachemire indien au Pakistan, engagent des combats contre l'armée de New Delhi. Ciblées par les rebelles, les populations hindoues fuient vers d'autres régions de l'Inde.
En 1999, c’est la guerre de Kargil : New Delhi accuse Islamabad d'avoir infiltré, dans sa partie du Cachemire, des combattants islamistes et des soldats pakistanais pour prendre le contrôle du glacier du Siachen, à plus de 5.000 m d'altitude : encore des morts.
En 2008, une série d'attentats djihadistes cause la mort de 166 personnes à Bombay. L'Inde accuse le Pakistan et interrompt le processus de paix engagé quatre ans auparavant.
En 2019, l’attentat suicide de Pulwama (Jammu et Cachemire) est revendiqué par une organisation terroriste pakistanaise…
Comme chacun peut le comprendre, depuis près de 80 ans donc, la même idéologie ne cesse de provoquer des infiltrations armées semant terreur et désolation sur le territoire indien, dans la parfaite indifférence de la « communauté internationale »…
22 avril 2025 : le Jammu-et-Cachemire encore meurtri par un attentat barbare.
Le Front de résistance (TRF), une organisation fantôme du parti interdit Lashkar-e-Taiba (LeT), basé au Pakistan, a revendiqué la responsabilité de ce sanglant attentat près de Pahalgam : 28 morts et 10 blessés.
Pour les détails, vous pourrez lire notre publication: https://www.sdbrnews.com/sdbr-news-blog-fr/le-cachemire-indien-cible-du-terrorisme-islamique?rq=cachemire
Fort du soutien américain, le gouvernement indien avait décidé cette fois-ci de réagir, de façon progressive mais déterminée, par une série de mesures immédiates dès le 23 avril (détaillées dans l’article ci-dessus).
Mais il y a un moment où il faut montrer que “trop c’est trop" !
C’est ce qu’a donc fait le gouvernement indien en déclenchant son « Opération SINDOOR ».
L’opération SINDOOR : une guerre contre le Terrorisme d’État
Avant l’attaque sur Pahalgam, la situation au Pakistan était déjà confuse :
troubles insurrectionnels avec les 6 millions de Baloutches (originaires d’Iran) qui vivent dans le sud du Pakistan ; tensions avec les Sindhis dans le sud-est ; tensions dans la poche du Khyber Pakhtunkhwa, haut lieu de concentration de mouvements terroristes islamiques, dont Lashkar-e-Taiba.
Faible crédibilité du gouvernement pakistanais.
Fort ressentiment contre l’armée pakistanaise.
Appels à la libération d’Imran Khan, personnalité reconnue et ancien 1er ministre pakistanais de 2018 à 2022, certainement victime d’être trop occidentalisé et trop à droite face à la gauche islamique.
Il est probable que le gouvernement pakistanais a choisi de détourner l’attention de sa population en exacerbant 3 sentiments anti-Indiens :
Le Cachemire est la veine jugulaire du Pakistan pour commercer avec la Chine, sous-entendu tous les maux intérieurs viennent du verrou du Cachemire indien…
Utiliser la religion pour réunir le Pakistan musulman, face à cette Inde qui n’est pas musulmane…
Faire mener des attaques au Cachemire par des Proxy… D’où le discours belliqueux du Général Asim Munir chef de l’Armée pakistanaise le 16 avril 2025, puis l’attaque sur Pahalgam le 22 avril 2025.
Puis, déni total du Pakistan de toute responsabilité dans cette attaque de terroristes islamiques. Nous verrons plus loin qu’il s’agit d’un mensonge d’État !
Préparation de l’Opération SINDOOR
Le gouvernement indien a donc déclenché la phase préparatoire de cette opération :
identification des cibles terroristes et information en temps réel de leurs mouvements ; préparation d’un plan de ciblage et préparation opérationnelle.
De même les Services indiens et les Agences de renseignement ont été mis en action coordonnée pour parer à toute éventualité de réponse de la part du Pakistan.
Enfin le recueil de preuves crédibles après les frappes a été coordonné avant le déclenchement des frappes. Comme nous l’avons compris, la manipulation de l’information est telle que même des preuves irréfutables sont souvent insuffisantes : « il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir »…
Puis des recommandations ont été faites par le gouvernement indien :
Frapper uniquement les infrastructures des 9 bases terroristes.
Ne pas toucher aux infrastructures civiles et militaires du Pakistan.
Ne pas agir par surprise contre un adversaire, le Pakistan, présentant une parité technique et opérationnelle comparable.
Ne réagir qu’en cas de réaction de l’ennemi…
9 bases terroristes ont ainsi été ciblées dans la nuit du 6 au 7 mai 2025
Au POJK (Pakistan-Occupied Jammu e Kashmir):
1/ Sawai Nala (Muzaffarabad) - 2/ Syedna Bilal (Muzaffarabad) - 3/ Gulpur (Kotli)
4/ Barnala (Bhimber) - 5/ Abbas (Kotli)
Au Pakistan:
6/ Bahawalpur - 7/ Muridke - 8/ Sarjal - 9/ Mehmoona Joya
Le Pakistan a répliqué à ces attaques ciblées par des tirs d’artillerie. Donc le 8 mai, l’Inde a utilisé des drones et des missiles contre des aérodromes militaires et des stations radars pakistanaises.
Dans la nuit du 9 au 10 mai le Pakistan répliquait à son tour par des envois de missiles sur des cibles indiennes.
Il semble que le général commandant les Opération Militaires pakistanaises (DGMO) ait fait la démarche d’appeler le DGMO indien pour évoquer un cessez-le-feu et le 10 mai 2025, un accord de cessez-le-feu « avec effet immédiat » a été conclu entre le Pakistan et l’Inde.
Jusqu’à quand ? L’avenir nous le dira.
Bilan de l’opération SINDOOR
Les principales bases terroristes ciblées par l’opération Sindoor ont été atteintes et des responsables importants ont été neutralisés : rappelons que c’était le but de guerre.
Coté pakistanais, la défense aérienne a été endommagée : radars de défense aérienne de Pasrur, Chunian et Arifwala.
De même, les principales bases aériennes pakistanaises ont été touchées avec des dommages importants : aérodromes de Sargodha, Rahim Yar Khan, Nurkhan, Sukkur, Bholari, Chaklala, Jacobabad et Shahbaz.
La Marine indienne a empêché l’accès à la Mer d’Oman à la Marine pakistanaise.
La défense aérienne indienne a été solide et les dégâts infligés aux infrastructures militaires indiennes semblent avoir été minimes.
Notons que l’Aviation pakistanaise semble avoir utilisé l’écran d’avions commerciaux pour lancer certains de ses raids contre les infrastructures indiennes.
La démarche pakistanaise de demande de cessez-le-feu était-il la preuve de leur supériorité aérienne ?
Quid des « Rafale » de l’Indian Air Force ?
L’Inde a doté son armée de l’Air de 36 avions Rafale de Dassault Aviation, par une commande passée en 2016. Elle vient de confirmer sa satisfaction de posséder l’avion de combat français par une nouvelle commande, le 28 avril 2025 : 26 avions Rafale Marine, dont les premiers seront livrés en 2030. L’Inde devient ainsi le premier pays Export pour le Rafale Marine.
L’Indian Air Force (IAF) a utilisé le Rafale pendant les 4 jours d’affrontements avec le Pakistan.
L’IAF dit être pleinement satisfaite des performances de l’avion français qu’elle a utilisé efficacement, y compris les 9 et 10 mai 2025 dans des misions d’interception et de défense aérienne.
Elle souligne avoir utilisé les plateformes Rafale avec des règles d’engagement restreintes, sous-entendant par-là qu’un engagement plus large aurait créé plus de dommages aux Pakistanais.
L’IAF assure avoir utilisé des leurres pour tromper la défense aérienne pakistanaise et a pu brouiller les renseignements électroniques pakistanais.
rafale by dassault
Des questions ont été soulevées suite aux « allégations du Pakistan disant avoir largement maitrisé son espace aérien et abattu plusieurs avions indiens ».
Nous avons posé la question et voici la réponse de l’Inde :
« Si les HQ-9, J-10 et PL-15**, les armes chinoises utilisées par le Pakistan, nous étaient tellement supérieurs, comment les avions indiens ont-ils pu frapper toutes leurs cibles la première nuit du 6 mai, alors que les Pakistanais s'attendaient à ces attaques ? Pourquoi n'ont-ils pas pu intercepter les avions et les missiles indiens les 9 et 10 mai ? Pourquoi aucun de leurs missiles n'a pu causer de dommages substantiels aux infrastructures indiennes ? Pourquoi n'ont-ils pas utilisé leurs J-10 et des PL-15 pour priver les avions de l'armée de l'Air indienne de toute liberté de mouvement ? ». Et d’ajouter cependant: “Il n'existe pas d'avion de combat sûr à 100%. Tout est une question de tactique et d'emploi”…
Autant en effet de questions auxquelles il a été donné peu d’échos dans la Presse, l’Inde considérant au passage que les médias français ont trop facilement adhéré aux discours américains et chinois dénigrant l’IAF et le Rafale:
les Américains pour mieux vendre leur F35, alors que Dassault Aviation marque des points importants à l’exportation en ce moment ;
les Chinois, car leur amitié « à toute épreuve » avec le Pakistan s’appuie sur leur commune détestation de l’Inde, sur la peur d’une Inde commercialement et politiquement trop influente dans la région, et sur le fait que ce sont leurs avions et leurs missiles que l’Inde a pu tester en temps réel à la face du monde…
Et puis, comment ne pas s’interroger aussi sur les silences de la Presse française face à la vraie nature du Pakistan ?
Un Terrorisme d’État
La preuve de la collusion entre les groupes terroristes et l’Armée pakistanaise a été révélée lors des funérailles de chefs terroristes tués dans les bombardements indiens, funérailles qui se sont déroulées entre autres à Muridke, dans un camp du groupe Laskar e Taiba (LeT dont nous avions longuement parlé dans notre article du 25 avril 2025 cité plus haut).
Ces funérailles étaient dirigées par le Chef du T, Hafiz Abdur Rauf, classé « terroriste mondial » par le département du Trésor américain.
Y ont participé et ont prié à ses cotés, une pléiade de hauts gradés de l'Armée pakistanaise et de l'Inspection Générale de la Police du Pendjab, parmi lesquels :
Lt Gen Fayyaz Hussain Shah, HI (M) – Corps Commander IV Corps, Lahore
Maj Gen Rao Imran Sartaj – GOC 11 Inf Div, Lahore
Brig Mohd Furqan Shabbir – Cdr 15 Hy Mech Bde, Lahore
Dr Usman Anwar – IGP Punjab
Malik Sohaib Ahmed Bherth – Membre de l’Assemblée Provinciale du Punjab.
Conclusion
Il faut souligner qu’Inde et Pakistan disposant de l’arme nucléaire, il était essentiel de rester pendant ces 4 jours à un niveau d’engagement conventionnel, pour éviter tout dérapage vers la nucléarisation de la confrontation.
L’influence civile au Pakistan s’est encore affaiblie depuis la prise de contrôle des Forces Armées par le général Asim Munir en 2022 : un homme autoritaire, qui était auparavant patron des Services de Renseignement de l’Armée (ISI).
Parallèlement, les obsèques qui se sont déroulés à Muridke montrent le rapprochement d’une partie de l’Armée avec le terrorisme islamique, ce qui pourrait amener à une certaine radicalisation lors d’une prochaine confrontation, donc à l’augmentation du risque nucléaire.
A l’avenir, un affaiblissement trop important du Pakistan pourrait donc l’amener à la tentation nucléaire.
C’est une donnée très importante pour la région toute entière.
Alain Establier
* Source AFP et L’Orient Le Jour
** HQ9 : missile sol-air SAM chinois – J-10 : avion multi rôles chinois – PL-15 : missile air-air chinois
Crédits photos: Dassault Aviation; IAF